Pâquerette était dans sa chambre, assise à son bureau. Elle était prise d'un gros coup de blues. Sa soirée n'avait pas plu, finalement. Les élèves préféraient se bécoter dans les couloirs sombres plutôt que de venir assister à sa fête, ce qui pouvait être compréhensible. Elle en avait même vu certain passer devant l'infirmerie et se moquer d'elle, patientant seule dans sa robe de soirée. Elle avait besoin d'un petit remontant. La vieille infirmière se dirigea vers son armoire et se saisit de la première bouteille qui lui tombait sous la main. Trois verres à liqueur plus tard, son état ne s'était pas amélioré.. Sa pendule lui indiquait qu'il était l'heure de manger.
Elle descendit lourdement jusqu'à la grande salle, et s'approcha de son fauteuil. Personne ne prêtait attention à elle, ni même ne daignait la regarder. Elle tira alors son siège en arrière pour pouvoir s'y installer. Au bruit du raclement des pieds de bois de la chaise sur le sol, ses voisins de table lui jetèrent un coup d’œil interloqué. Ah. Non. C'était le fauteuil qui les intéressait. Pâquerette baissa les yeux, et s'assit discrètement. Elle se servit doucement dans les plats qui se présentaient à elle, et porta machinalement sa fourchette à sa bouche, les yeux dans le vide. Quelques bouchées plus tard, sortant de ses pensées, elle remarqua des dizaines, voir même des centaines, paires d'yeux rieurs braqués sur elle, la pointant du doigt, mimant le geste quasi-mécanique qu'elle faisait quelques instants plus tôt avec sa fourchette. L'infirmière ferma les yeux et prit une grande inspiration. Les visages amusés et moqueurs des élèves tourbillonnaient dans son esprit, et le brouhaha de la pièce ne faisait que lui créer une migraine insoutenable. Elle se leva brusquement. « Permettez que je sorte de table ? » Elle n'attendait pas de réponse particulière, et se dirigea directement vers la sortie. Elle eut juste le temps d'entendre la voix de Cordélia Dolohov. « Mais qu'était-ce donc que cette créature ? Monsieur Dumbledore, pouvez-vous me dire à quoi rime cette farce ? ». Pâquerette ferma la porte, le cœur lourd. Elle traversa de nombreux couloirs, et finit par se retrouver dans le parc. Il faisait nuit.
L'air frais lui fit du bien. La chaleur était devenue étouffante dans la grande salle. La vieille femme retira ses souliers marcha dans l'herbe, appréciant son contact. Si elle n'était pas aussi mal en point, la scène qui venait de se dérouler l'aurait fait rire, car elle aurait été digne d'un film dramatique. Ou peut-être même d'une pièce de théâtre. Pâquerette sursauta. Ses pieds venaient d'entrer en contact avec le lac. L'eau était glaciale. Attendez. Ses pieds ? Elle ne les voyait pas. Là où ils auraient dû se trouver, l'herbe était écrasée et il y avait un vide dans l'eau. L'infirmière essaya alors de regarder ses bras, ses mains, ses jambes, son ventre... Tout avait disparu. Il n'y avait plus rien. Peut-être était-elle morte ? Cette idée ne l'effrayait même pas. Au contraire, elle lui plaisait presque. Après tout, si personne n'en était revenu, c'était forcément parce-que c'était mieux que la vie. Mais... elle ne pouvait pas être morte. Les morts ne laissent pas de traces de pas dans l'herbe. Elle se surprit alors à en être déçue. Elle était simplement invisible.
Une tentacule du Calmar Géant vint troubler la surface parfaitement plane du lac. Elle s'approcha pour effleurer le mollet de Pâquerette, comme si il sentait sa mélancolie. Comme si il pouvait la voir, malgré l'obscurité, l'eau et son invisibilité. Elle se baissa et caressa la tentacule, puis s'assit dans l'herbe, plongeant ses jambes et sa robe jusqu'aux genoux dans l'eau glacée. Elle s'était toujours mieux entendu avec les animaux qu'avec les personnes. Pourtant, elle recherchait inlassablement leur compagnie. C'est pour cette raison d'ailleurs qu'elle avait choisi de devenir infirmière, et non pas vétérinaire. Ce métier l'avait également attiré. Elle avait longuement hésité, avant de privilégier le contact humain. Ce n'était qu’aujourd’hui qu'elle remettait ce choix en cause. Elle avait également songé à pratiquer dans le monde moldu. Mais elle était trop vieille, et les gens de son âge ne pouvaient plus travailler. Il y avait aussi Sainte-Mangouste ; mais là-bas, ils ne cherchaient que des jeunes à former. C'est dans cet hôpital qu'elle avait fait ses débuts. Tout cela lui semblait bien loin, elle avait fait son temps.
La vieille femme se leva alors, et adressa d'un ton résolu un « Au-revoir. » au château. Elle donna ensuite une caresse à la tentacule qui effleurait ses chevilles. Puis elle se laissa glisser entièrement dans l'eau. Elle fit quelques brasses pour s'éloigner du bord, puis s'enfonça dans les profondeurs du lac gelé. Elle voulait que le froid s'empare d'elle et l'emporte. Elle sentit vaguement quelque-chose attraper sa jambe avant de perdre conscience.

Le lendemain matin, elle fut découverte par un groupe d'élèves se rendant en cours de botanique, dans les serres. Elle était allongée dans l'herbe, inconsciente. Le Calmar l'avait sortie de l'eau. L'alerte fut donnée et on la transporta d'urgence à Sainte-Mangouste. Pâquerette était dans le coma.

Je ne sais pas si elle se réveillera un jour. Ce fut en tout cas un plaisir de faire votre connaissance à tous ! Au moins, vous n'aurez plus à subir mes questions. Si quelqu'un veut compter les points de participation à l'animation, j'en fais don à Serdaigle. Ne cherchez pas d'explications, c'est moi qui déraille en ce moment. Toujours est-il que vous Rpez magnifiquement bien, et je prenais plaisir à vous lire. Au-revoir