Tu n'aimais pas vraiment la bibliothèque ; tu n'avais jamais compris ce qui pouvait bien pousser tes camarades à venir s'enfermer ici la journée pour lire ou pire, pour étudier alors qu'il y avait des choses tellement plus intéressantes à faire hors de ce lieu maudit, plus communément appelé une bibliothèque. Les examens approchent, te répétaient-ils. Mais tu t'en fichais : ce n'était pas cette menace qui te ferait mettre un pied là-bas. Tu ne craignais pas les examens. Comme d'habitude, tu réviserais au dernier moment - à vingt-trois heures la veille - et tu arriverais à obtenir les notes qu'il te fallait pour passer. On n'était jeune qu'une fois et tu entendais bien en profiter un maximum avant de quitter Poudlard. Avant que les choses sérieuses ne commencent, chose que tu redoutais un peu trop. Les choses sérieuses, ça n'avait jamais été ton truc. Tu avais besoin de t'amuser, de profiter du monde qui t'entourais. Et tu préférais oublier que, d'ici peu, tu devrais devenir une adulte responsable, prête à entrer dans un monde auquel tu ne correspondais guère.
Tu détestais la bibliothèque et tu ne ressentais pas vraiment le besoin de t'y rendre aussi souvent que tes camarades, d'ailleurs. Des devoirs, des recherches à faire? Il te suffisait d'aller voir un Serdaigle pour gentiment lui demander de les faire à ta place ou alors t'inspirer des travaux d'autres élèves pour réussir à écrire tes trente centimètres de parchemin la veille du délai qu'il t'avait été imposé. Oui, tu étais flemmarde et tu en avais totalement conscience. Pourtant, malgré les reproches que continuaient de te faire des parents et les rares personnes que tu considérais comme tes amies, tu t'en fichais ; ta situation te convenait à merveille.

Et pourtant, il t'a suffit d'un seul hibou pour te convaincre d'aller en enfer. Un bout de parchemin signé B, qui te demandait - ou t'ordonnait plutôt - de te rendre à la bibliothèque une fois la nuit tombée. Tu n'avais jamais été une fille obéissante, mais avec celle que tu devais retrouvée dans l'heure, c'était différent. Avec elle, tu n'étais pas aussi bavarde que d'ordinaire ; tu ne la connaissais pas vraiment, vous n'aviez rien à vous dire. Vous aviez d'ailleurs tellement mieux à faire que de perdre votre temps avec des bavardages inutiles. Parfois, tu te comportais comme elle te le demandait ; d'autres fois, tu n'en faisais qu'à ta tête. Tu ne saurais vraiment définir votre relation tant elle était particulière. Tu n'étais pas attachée à cette fille, non. Pas le moins du monde. Mais votre relation vous convenait à toutes les deux et, tant que ce sera le cas, tu n'y mettras pas un terme.
Lorsque tu sentis l'heure de votre rendez-vous arriver, tu te leva et remis ta robe de sorcier par dessus tes vêtements, consciente que tu devrais bientôt t'en débarrasser. Et lorsque tu voulus te diriger vers la sortie de ta salle commune, une voix t'interpella : « Tu vas où, comme ça ? » Tu te retournes vers l'une de tes camarades de dortoir, qui te regarde d'un air soupçonneux. Toi et ta mauvaise habitude de quitter la salle commune des Serpentard au beau milieu de la nuit. Tu as déjà fait perdre pas mal de points à ta maison à cause de cette manie, à un tel point que les lionceau ont faillit reprendre la première place. Mais tu ne te laisserais pas avoir par une professeur une nouvelle fois. Pas ce soir. « J'ai des choses à faire. » L'autre continuait de te regarder et tu arrivais à lire une certaine méfiance dans son regard ; elle ne te croyait pas et tu préférais l'ignorer. De toute manière, tu ne comptais pas lui dévoiler tes plans pour la soirée. Elle pouvait bien essayer de te questionner, tu ne lui donnerais pas la réponse escomptée. « Fais attention. Si Dolohov... » « Elle ne m'attrapera pas. » Le ton de ta réponse était sec, mais ton vis-à-vis t'agaçait. Ne pouvait-elle pas se mêler de tes affaires? Tu étais pressée ; tu allais finir par arriver en retard si elle continuait à te ralentir et tu n'aimais pas faire attendre Berlioze - c'était bien comme cela qu'elle s'appelait, la fille que tu devais voir, non ? - même si, la plupart du temps, c'était elle qui venait avec quelques -longues- minutes de retard. Tu soupirais alors qu'un léger sourire se dessinait sur tes lèvres. « Tout ira bien. Pas de Dolohov, pas de retenue, pas de points en moins. Ca sera une promenade de santé, rien de plus. » Et sans même attendre sa réponse, tu quitta le repère des vert-et-argent.

Dehors, les couloirs étaient calmes, désert. L'heure du couvre-feu est passée depuis plus d'une heure ; il faudrait être fou pour quitter son dortoir maintenant ; Dolohov rôde, tu le sais. Tu espères simplement que la harpie ne sera pas sur ton chemin. Ta main se souvient encore de votre dernier tête à tête. Rapide, discrète, tu montes les escaliers pour te faufiler dans la bibliothèque. Vide à cette heure-ci également - même les Serdaigles ne sont pas assez dérangés pour passer une nuit ici. Comme prévue, Barbara n'est pas là. Tu t'y attendais ; tu avais l'habitude d'arriver sur vos lieux de rendez-vous en avance. Alors, tu décidas de t'asseoir et de patienter. Parce que tu n'avais que ça à faire, patienter. Tu ne pris aucun livre, car tu y étais allergique ; tu te contentais d'observer les environs. Tu n'étais pas venue ici souvent ; tu te souvenais de la visite des lieux lorsque tu es arrivée à Poudlard - onze ans auparavant. Tu avais du y venir deux ou trois fois, lorsque tu étais encore assez sérieuse pour daigner t'intéresser à tes cours. Mais ces dernières années, tu n'y avais plus remis un pied.
Lorsqu'enfin, Brigitte montre le bout de son nez et s'approche, tu l'attires près de toi et tu prends possession de ses lèvres. Vous n'avez pas besoin de politesses, vous n'avez besoin de rien. Vous ne vous connaissez pas. Vous n'êtes pas amies et vous ne le serez sans doute jamais, mais tu t'en moques. À tes yeux, cette fille n'est rien. Ce n'est qu'un jouet, une manière de passer le temps. Et tu sais que, pour elle, ce n'est pas si différent.