C'était calme. Tout était toujours calme au cinquième étage en fait. Quand Reed Fenwick s'y rendait, il était toujours seul dans les couloirs. Parfois, il croisait des amoureux qui essayaient de se cacher des yeux de Dolohov en s'embrassant dans un recoin sombre. S'embrasser, voir plus parfois, mais Reed leur rappelait qu'ils devaient se retenir, un peu du moins ou alors, se dénicher une pièce secrète pour plus si affinité. C'était son rôle de préfet après tout et il abordait avec une petite arrogance dissimulée tant bien que mal, l'insigne sur sa robe de sorcier. Néanmoins, avoir des pouvoirs en plus était un handicap dans certains cas. En effet, Reed devait faire bonne figure et jouer aux hypocrites face à certaines personnes comme cette harpie de Dolohov. Il devait sourire alors qu'au fond, il ne voulait qu'une chose, lui enfoncer la tête dans du jus de veracrasse et pourquoi pas, la pousser du haut de la tour d'astronomie tellement cette vieille femme l'agaçait. Mais Reed prenait sur lui. Sa mère lui avait sans cessé répéter mon roudoudou d'amour, il faut rester calme sinon, tu auras des ennuis, même si je sais que c'est difficile. Roudoudou n'avait pas du touuuuut envie d'être calme, surtout pas aujourd'hui en fait ! Ce-matin, en prenant le petit déjeuner dans la grande salle, bon, il faut noter qu'un petit déjeuner chez l'ainé des enfants Fenwick, c'est deux bols de chocolat chaud, un thé à la menthe, six tartines et une pomme, il avait essayé de trouver Briséis, sa - fausse - sœur. C'est ensemble qu'ils avaient découvert que Briséis n'était pas une Fenwick de sang et elle avait le don de parler aux serpents. En fait, ils avaient toujours été proches. Il était son héros, elle était sa princesse. C'est ensemble qu'ils avaient toujours exploré les alentours de la maison familiale, qu'ils s'étaient tirés des situations qu'on se fait quand on est petit, qu'ils avaient prit des bâtons pour tuer les vilaines ronces et traverser la petite forêt qu'ils pensaient magiques. Alors Reed s'était toujours retenue. C'était sa soeur, sa... Soeur. Rien d'autre. Au fond, il devait la protéger, mais plus il grandissait, plus du poil poussait à son menton, plus il voyait Briséis comme quelque chose de plus profond, de plus... Interdit. Alors quand il avait apprit qu'elle n'était pas sa soeur de sang, qu'un autre coulait dans ses veines, il avait laissé place à la tentation, puis aux plaisirs de goûter les lèvres de celle qui restait sa soeur, mais qui devenait plus. Ce n'était pas interdit, pas entièrement, mais vivement déconseillé et ensemble, ils vivaient une idylle secrète, partagés entre le fait d'avoir grandit ensemble, avoir passé les fêtes en pensant qu'ils avaient le même sang, plus que le même nom et celui de céder à leurs attirances si étranges qui dormaient depuis tout petit, au fond d'eux. ❝ Amande citrouille. ❞ murmura Reed. Doucement, le mur se divisa en deux, laissant apparaître un chemin et une imposante pièce. La salle de bain privée des préfets. C'est là que Reed avait donné rendez-vous à sa soeur, lui donnant le mot de passe pour accéder à la pièce convoitée par tant d'élèves. C'était un vaste espace avec des reflets de couleur venant des vitres. Au centre, on pouvait voir une grande baignoire vide et les multiples robinets qu'il fallait activer pour se prendre un bain où le plaisir était à son paroxysme. A côté de la porte, on trouvait un petit banc en pierre et une armoire pour y accrocher ses affaires. Reed s'y installa, silencieux. Il attendait Briséis de pied ferme. Dans la matinée, il avait vu rôder autour de sa soeur, encore une fois, ce satané garde de chasse. Truc-Ardhen-Adhen un nom débile pour un dragueur de pacotille. En voyant la scène de loin, le préfet avait senti une nette pointe de jalousie en lui et avait interrompu la discussion entre Briséis et l'adulte pour entraîner sa soeur au loin et lui ordonner de la retrouver ici pour midi. Désormais, il attendait. Bien entendu, il savait qu'elle avait mal prit sa réaction et elle pouvait ne pas venir, mais non... Elle viendrait pour mettre tout ça au clair. ❝ Briséis.. ❞ son regard vira sur les portes qui s'ouvrirent. Il fixait la belle en souriant, un peu gêné. Depuis tout petit, il ne supportait pas qu'on s'approche de trop près de sa soeur. Il avait toujours été là et en grandissant, ça c'était accentué, même quand le sorcier avait eu quelques petites-amies, se forçant à les bécotter pour oublier sa soeur et les sentiments pour elle, mais dès qu'il la voyait entrain de se faire convoiter par un autre, c'était plus fort que lui, il intervenait. ❝ Merci d'être venue. ❞ maintenant, les querelles allaient débuter sur une pointe de... Douceur ?

Tu détestais Reed. Non, même plus que ça en fait. Tu le haïssais. Et même le brouhaha de la Grande Salle - que tu avais toujours trouvé apaisant et chaleureux - n'arrivait à te faire oublier combien tu lui en voulais. Il voulait jouer les grands frères protecteurs, il rappliquait dès qu'un garçon osait t'approcher de trop près. Grand frère. Ce terme sonnait faux à tes oreilles. Il l'était. Tu n'étais pas une Fenwick. Enfin, pas vraiment. C'était un autre sang qui coulait dans tes veines, un sang dont tu ignorais l'origine. Reed n'était pas ton frère, pas biologiquement parlant. Pourtant, tu essayais tant bien que mal de t'en convaincre. Tu étais une faible femme, Briséis. Et tu avais peur de tes faiblesses, que tu ne connaissais que trop bien. Un soupir s'échappa de tes lèvres lorsque tu baissas les yeux sur ton assiette. Un carnage. Tu n'avais pas eu Reed en face de toi pour te défouler, alors tu t'étais vengée sur tes légumes qui gisaient à présent en piteux état. Il voulait te voir. A midi précise. Et honnêtement, tu n'avais aucune envie d'aller à sa rencontre. À quoi bon? Tu savais déjà autour de quoi tournerait votre conversation et tu n'avais aucune envie de l'entendre te faire la morale. Et tu étais tellement en colère par rapport à ce qu'il s'était passé le matin même que tu ne voulais pas lui faire grâce de ta présence. Et pourtant. Pourtant, tu te levas en déclarant à tes camarades que tu avais assez mangé. Et tu quittais la grande salle avant la fin du repas. Une dizaine de minute avant midi ; tu étais de nature ponctuelle et, même lorsque tu étais énervée, tu ne changeais pas tes habitudes. Tu montais les escaliers, lentement, songeant à la matinée que tu avais passé. Tu avais croisé Ardhen, le garde chasse. Tu t'étais arrêtée pour échanger deux trois mots - des banalités - avec lui. Mais ce n'était ni le bon endroit, ni le bon moment ; Reed traînait dans le coin. À peine avais-tu eu le temps de lui demander comment il allait que ton frère t'arrachait à lui, avant de te planter sur place en te donnant un lieu et une heure. Salle de bain des préfets, midi tapante. Tu avais longtemps hésité - ça t'avait pris toute la matinée - et finalement, pourquoi pas. Tu pouvais bien entendre ce qu'il avait à dire, tu devais mettre cette histoire au clair. Même si tu redoutais votre rencontre. Reed, le fruit défendu. Le frère qui, lorsque vous étiez petits, te protégeait de ses bras contre les monstres qui pourraient t'attaquer. L'amant qui, depuis quelques temps, jouait avec tes lèvres, avec ton corps. Toi qui était généralement raisonnable, tu étais tombée bien bas. Mais tu ne savais pas lui dire non. Pas bien longtemps, en tout cas. Reed et toi... Tu n'avais pas le droit. Et tu en avais parfaitement conscience. Lui, semblait se foutre de la situation. Comme s'il acceptait cette relation malsaine qui s'était installée entre vous, ce qui était loin d'être le cas de ton côté. ❝ Amande citrouille. ❞ Le mot de passe de la salle des bains des préfets. Tu y étais enfin arrivée - midi une d'ailleurs, tu étais en retard - mais tu étais toujours en colère. Il n'y avait pas l'ombre d'un sourire sur ton visage alors que les portes s'ouvraient devant toi. Reed était déjà là, assis sur un banc. Et malgré toi, ton coeur rata une mesure lorsque tu le vis - génial, vraiment génial. Tu haïssais Reed. Plus que tout au monde. Mais s'il avait mille défauts, ton frère avait mille et une qualité. De telle sorte que tu n'arrivais pas à détester cet homme. Paradoxalement, le sentiment de haine que tu avais parfois envers lui ne faisait qu’accroître tes sentiments - et tu te détestais d'être aussi faible. ❝ Merci d'être venue. ❞ Au fond, t'avait-il laissé le choix? Il te connaissait ; il savait que tu viendrais. Et tu le détestais pour ça aussi : parce qu'il te connaissait trop bien. Tu pénétras dans la pièce, tu fis quelques pas dans sa direction. Mais tu ne t'installas pas à côté de lui ; tu restais debout, face à Reed. Les bras croisé, le regard fuyant. ❝ Je t'écoute. ❞ Tu étais là pour discuter et pas pour faire... d'autres trucs. Autant mettre les choses au clair d'entrée de jeu. Un silence qui dure quelques secondes, avant que tu ne reprennes : ❝ Tu m'expliques ton comportement de ce matin ou tu espères me faire deviner la bonne réponse? ❞ Tu étais de mauvaise humeur, tu avais sorti tes griffes. Mais tu te connaissait, tu savais mieux que quiconque comment tu fonctionnais. Et tu ne faisais jamais bien longtemps la tête à Reed.